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le terrain de sport
9 octobre 2015

pas vu pas pris - take me i'm yours - Paris

TAKEMEIMYOURS1

Je pourrais prétendre que je n'ai pas vu cette expo parce que je ne disposais pas du temps nécessaire ou que je n'y suis pas passé depuis si longtemps que je ne sais même plus où se situe le quai de Conti. Mais c'est plutôt d'une absence d'envie qu'il s'agissait. La même absence d'envie à laquelle me confronte le travail d'un Duchamps, le ready made ou son inverse le DIY en général et toute tentative non pas de déconstruire, mais de vulgariser le geste artistique, de le remettre au centre de l'appréhension des spectateurs. De déléguer, en fait. De passer le témoin. De renvoyer l'artiste à un statut de penseur et non plus de magicien - ou de sorcier - et partant, d'imposer au spectateur le personnage d'artiste en puissance et non plus de sujet cogitant. Car c'est là que le malentendu réside. L'émerveillement ou la terreur ou le doute, admettons, puis la réflexion - puisque, logiquement, chacun voudra comprendre ce qui le transporte ou l'effraie, et saisir les mécanismes mis en route par ces mises à sac des sentiments que représentent les oeuvres les plus marquantes - suscités par l'art, sont interrogés depuis longtemps par des théoriciens qui souhaiteraient le spectateur artiste et acteur et l'artiste simple pourvoyeur de propositions. L'artiste tableau noir et craie blanche et le spectateur enfant happé ou rejeté par la page blanche.

Mais Boltanski et les autres interprètes à l'ouvrage - devrait-on plutôt dire : à la réflexion - sur la mise en scène de la Monnaie de Paris, ont laissé à l'écart un critère de taille. La paresse naturelle du public. Public qui va entrer dans les lieux, emplir son petit sac plastique des petites idées mises à sa disposition par d'autres, et s'en repartir avec la sensation d'avoir fait oeuvre de création là où le processus, dans le meilleur des mondes, ne vient que de s'enclencher. Les artistes seront satisfaits parce que le principe aura fonctionné. Et les participants enthousiastes parce qu'ils auront adhéré au principe. Un courant sera passé - ce qui est probablement l'intention première et, en cela, la réussite est intégrale - mais rien ne restera. Une tour Eiffel miniature, un badge, une capsule d'air, un chemisier trop grand. Rentré chez lui, le visiteur se retrouvera seul avec ses objets, désormais dépourvus de sens, et sans solution de connexion. Et l'artiste pourra s'estimer heureux d'avoir harponné autant de gros poissons, allumé une étincelle de désir dans l'oeil et dans le cerveau d'un public si conséquent. Désir qui ne se sera pas concrétisé. Seule une certaine idée de l'art tiré vers la gratuité aura pu trouver ses marques. Ce qui n'est pas négligeable. Et le baluchon d'émotion de l'impétrant demeurera intact. Prêt pour un nouveau départ.

la_grande_braderie_1

grande_braderie_2

Merci de votre attention

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